Tu prends un blabla-car au 159 Route des Romains 67200 Strasbourg.
Tu écoutes tintinnabuler les hantises.
Le conducteur est muet ou silencieux.
Un autoradio déroule la bande magnétique, petit mécanisme analogique.

Tu t’endors vaguement.
Le trajet est lancinant jusqu’au moment où la furie des 33 tonnes fait joujou. L’autoroute est leur royaume.
Tu penses à Zrenjanin au Banat Central. À Angelo, ton ami de Kat et de Rakija.

Une moto Giacomo 1985 s’encastre dans la balustrade. Ne pas s’arrêter.
Tu sais qu’elle t’attend. Ample. Olga ne sourie jamais. Continue.
La cassette couine de crissements plastique au rembobinage.
Tu penses que tu veux descendre de cette voiture.
Que tu es prisonnier.
Que tu es en train de mourir dans le tambour d’une machine à laver.

Tu te réveilles sur l’aire du Fronholz. La voiture a disparue.
Ton sac est à côté de toi. La cassette porte le mot Malhowne. Il gèle. Les arbres griffent le gris sans fond du ciel. Alors tu vomis tout. tout.
Tu vomis aussi doucement que l’air qui tourne à l’intérieur de ta tête. L’avant-dernier morceaux, est élégant comme le somptueux Nikita. Ce beau gosse qui dessine des chats morts sur le murs de la cellule, 17 Rue Jacques Preiss, 68200 Mulhouse. Inlassablement.

miss xmx


« Toli » signifie miroir. Dans certaines régions Mongole et en République de Bouriatie, il est utilisé lors de pratiques chamaniques. Dans notre processus de création, les éléments ne s’interconnectent pas immédiatement. On joue souvent avec plusieurs symboles et au fur et à mesure de nos compositions et de nos nouvelles découvertes culturelles nous organisons le sens et la direction que nous souhaitons prendre.

Notre dernier album Poena Cullei, traitait du parricide. Nous cherchions déjà à nous réinventer dans le groupe en termes de structures sonores, d’instrumentarium et de façon de composer en studio. Pour Toli, nous avons pu laisser des temps de respiration entre les sessions d’enregistrement et expérimenter nos nouveaux morceaux en live.
Quand les morceaux ont commencé à prendre forme, on cherche à leur donner une identité propre en explorant des œuvres de fctions (films, livres, contes, mythologie...) pour nous en nourrir et interconnecter des images, des histoires avec nos compositions.

Pour Toli le choix de ce nom est venu un peu au hasard des recherches de Jeremy, le batteur. L’idée première de la pochette est venue assez instinctivement. Nous avions déjà envie d’y montrer la plaque de tôle que nous avons utilisée sur le morceau Angelo pour doubler la caisse claire. En regardant la plaque, on a tous les quatre aperçu un visage dans les détails de la rouille et la surface miroitante de la plaque. Il ressemblait fortement au masque présent sur la pochette de Poena Cullei. Pour nous c’était comme un signe du destin ! On parlait d’une mort symbolique par noyade de notre passé et on a composé un masque de nous quatre pour l’incarner. De le retrouver ici dans cette plaque faisant parfaitement sens. On l’a donc photographié lors de notre session d’enregistrement à la Drêche (Strasbourg) en Juillet dernier.

C’est donc en recherchant des notions et des termes autour du miroir que Toli est apparu et pour nous il était aussi intéressant au sens de reflet déformant, piégeant une entité qui résonne de l’autre côté du miroir.

Les titres de l’album sont quant à eux tous incarnés par des prénoms.
On a décidé de les nommer ainsi pour les faire exister en tant que personnages au sein de l’album. En tant que morceaux, mais aussi en tant qu’images qu’on retrouve à l’intérieur de la pochette. Nos personnages deviennent alors les membres d’une histoire commune. Ils partagent un passé et une mémoire. Les événements se superposent et se confondent, rendant le tout totalement onirique.

Nous avons plus utilisé le temps du studio comme un pur espace de liberté pour cet album et ça nous a permis d’utiliser une plus grande variété de sons que sur les précédents. Nous avons ramené des sons du feld-recording avec une fête celtique en Bretagne, le son du vent traversant des mâts de bateau, la cuisson d’un artichaut, un frigo à Reims, un carillon et des cloches à la Drêche... L’apparition de l’électronique nous permet de traverser un prisme de sonorité beaucoup plus vaste et l’ajout d’instruments à vent comme le xaphoon offre aussi un équilibre entre une couche de synthétique couverte d’accents bruts.

Toli est réellement un album concept dans le sens où nous avons cherché à raconter une histoire complète. Le cut-off/cut-up dadaïste du livret, les compositions sonores et les clips sont un tout qui forment une narration. Sans pour autant être trop littéral, c’est l’avantage des morceaux instrumentaux. Il y a une part de fiction qui se dévoile, donne des pistes, sans pour autant imposer. Et le reste de l’histoire peut se dérouler sans mots dans l’imaginaire de ceux qui écoutent.